Perspectives et résultats des sociétés sous haute surveillance
Cette semaine qui s'annonçait axée sur les anticipations de taux et le début des premiers résultats de sociétés aura tenu ses promesses. Les soubresauts bancaires ont disparu en terme d'ampleur importante de la surface des bourses et les statistiques globales ou dites 'macro-économiques' ont cédé la place à l'analyse et aux réactions dites 'micro-économiques', c'est à dire au cas par cas, société par société. Le début de semaine très peu volatil s'est ainsi accéléré hier sur les craintes sur les taux puis se sont évaporées avec les propos du patron de la BCE avant que les perspectives d'activité de Wal Mart et Dupont ne viennent imprimer un trend positif. Aujourd'hui, la baisse de la confiance du consomateur US n'aura pas fait tressaillir les bourses alors que les résultats en-deça des attentes concernant le géant General Electric auront renvoyé rapidement le CAC 40 sur les plus bas d'hier.
Avant de voir tout ceci dans le détail, commençons par voir ce qui est à la base de ce comportement, les risques bancaires sont toujours là, les risques liés au dollar également ainsi que nous l'indiquions lundi comme étant les arbitres potentiels permanents mais ils sont passés au second plan.
Dans un déluge d'informations concernant le ralentissement et la hausse des matières premières et donc de l'inflation, un grand nombre de statistiques à travers la planète font état toutefois d'un diagnostic immédiat très contrasté voire flou. La Chine par exemple aura vu en 2007 sa croissance révisée à 11,6 % au plus haut depuis 1994 alors que l'Espagne fait face à un ralentissement brusque qui serait sur le point de diviser par 2 sa croissance très liée à la construction et à l'immobilier (+3,8 % en 2007, 2,2 % prévus en 2008 et 2 % en 2009), un plan de relance immédiat pour soutenir l'économie est entrain d'ailleurs d'être mis en place dans ce pays.
Autre exemple, si la production industrielle française reste en hausse, la situation italienne est en train de déboucher sur une contraction de - 0,8 % sur un an avec une révision de la croissance économique de la péninsule drastique de + 1,5 % à + 0,6 % pour l'année en cours agrémentée de commentaires acerbes sur ce dernier chiffre qui reste très optimiste pour beaucoup. Au contraire, aux portes de l'Euroland, les Ex-pays de l'est selon les prévisions actuelles devraient voir leur croissance s'établir à + 4,4 % en 2008. Enfin, alors que le ralentissement se fait sentir globalement, le pétrole reste sur des niveaux records.
→ Si le sens est connu, l'ampleur, la vitesse ainsi que les localisations des évolutions économiques négatives restent encore difficilement palpables. Les résultats des sociétés surtout mondiales prennent ici tout leur intérêt pour déterminer :
- tout d'abord l'ampleur des dégâts le cas échéant et cerner au mieux les points ci-dessous et les secteurs touchés
- enfin et surtout, car il s'agit d'une zone d'ombre encore plus difficilement quantifiable, d'appréhender comment réussissent les entreprises dans un environnement où les marges sont affectées par la hausse des matières premières.
Le tri se fait donc comme d'habitude par rapport aux prévisions et aux anticipations au cas par cas mais ceci permet d'aiguiller les opérateurs sur la tendance globale plus qu'à l'accoutumée. Les perspectives évoquées par les dirigeants prennent fatalement encore plus d'ampleur. Le démarrage avec General Electric, un conglomérat présent dans la finance ou les moteurs d'avions et dans des domaines très divers avec 10 000 employés rien qu'en France a eu ainsi une résonnance particulière s'agissant d'un conglomérat industriel présent dans beaucoup de secteurs et pratiquement partout.
Le résultat pour le 1er trimestre s'est érodé à 0,43 $ par action contre 0,44 $ l'an dernier. Rien de grave jusqu'ici mais le delta par rapport aux anticipations situées à 0,51 $ est nettement plus important remettant en cause la valeur, en tant qu'espoir de retour sur investissement, que chaque investisseur à en main. Un peu plus difficile encore, la progression d'au moins + 10 % du résultat sur l'année attendue initialement vient d'être revue dans une fourchette de "0 à + 5 %. Enfin, l'explication de ce "profit warning" (avertissement sur résultat) réside dans le ralentissement économique et la crise du crédit pour les filiales financières mais aussi industrielles et de santé. Le titre perd - 12,79 % à New york et - 11,81 % plus tôt à Paris emmenant tous les indices à la baisse avec le CAC 40 qui lâche - 1,27 % à 4 797,93 points et le Dow Jones qui chute de - 2,04 % à 12 325, 42 points.
Certes, de même qu'une hirondelle ne fait pas le printemps, un vent frais ne fait pas non plus un hiver, mais cela refroidit cependant une grande partie des investisseurs sur les réalités de développement des sociétés et même de secteurs hors finance et immobilier. L'idée de sociétés résistant au marasme vient de se fissurer sur la nouvelle et chacun doute un peu plus de la qualité des valorisations des titres détenus. Si certains titres sont jugés peu chers depuis quelques semaines, en regard de perspectives qui s'assombrissent, ils le deviennent fatalement un peu plus et donc moins attractifs ou comportant plus de risques. La logique est au réajustement... les opérateurs se délestent de l'action et cela fait tâche d'huile.
Parmi les autres statistiques US, on notera la baisse du moral des ménages US suivant l'indice de l'Université du Michigan à son plus bas de 26 ans et la hausse des prix à l'importation de + 2,8 % en mars avec + 9,1 % pour les seuls produits pétroliers. La hausse est de + 14,8 % sur un an et de + 7,9 % pour ceux à l'exportation.
→ Terminons enfin avec l'enquête de prévisions réalisée par le Wall Street Journal auprès de 64 économistes sur la première économie au monde :
- 80 % approuvent le soutien à Bear Stearns (le soulagement post-panique a donc été très large)
- 1 économiste sur 3 seulement pense que l'économie US n'est pas encore en récession... les 3/4 pensent qu'elle n'a pas encore touchée le fond.
- les plus grands soucis dans l'établissement des prévisions concernent : à 35 % les marchés du crédit et une dégradation supplémentaire (menace et incertitude toujours N°1), à 25 % la baisse des dépenses des ménages et à 13 % seulement la baisse du marché immobilier.
- 67 % jugent que le point bas de l'immobilier sera atteint l'an prochain
- la plupart envisage cependant un rebond de l'économie au 3 ème trimestre.
Les articles cessent à compter de ce soir et toute la semaine prochaine. Ce week-end est à nouveau à ne pas mésestimer avec le G7 - Finance. Nous vous laissons les marchés en main et vous invitons pendant ce laps de temps à nous faire part de toute suggestion ou de thème que vous souhaiteriez voir aborder au courant 2008.
L'économie et la bourse se fichant éperdument du calendrier et alors que je vous souhaitais une bonne année 2007 en septembre 2006 dans l'édito intitulé 'Récession immobilière en vue ?, Virer de bord... trop tard mon capitaine !' il est temps de clore cette année 2007 très longue qui semble s'être achevée en ce début de printemps et de vous adresser mes meilleurs voeux (toujours économiquement parlant) pour cette année 2008 qui vient de démarrer pleinement.
En attendant la suite des évènements toujours en direct, restez sur le pont l'oeil bien ouvert..