Bourse : les marchés actions cèdent mais ne rompent pas
Le message du Trésor US après avoir sécurisé Fannie Mae et Freddie Mac il y a 10 jours est de protéger au maximum le coeur financier et les dépôts des épargnants tout en provoquant parmi les banques une restructuration drastique des problèmes sans fin dont elles sont l'objet. Les problèmes de crédit ayant largement leur source dans la périphérie du système financier aux endroits les moins règlementés ou régulés, les autorités obligent les institutions financières à un grand nettoyage en ces endroits. Ce que les marchés évaluent est donc la capacité à digérer cette phase dont la nature même présente un aspect positif en tant que début de solution pour apurer enfin une grande partie des pertes.
. pour plus de détails → Aux portes de la zone vitale du système financier US
Le marché a-t-il la résilience pour ce faire ? C'est justement toute la question qui se pose à tout un chacun depuis 2 jours et c'est un travail de longue haleine pour Monsieur le Marché ces prochains mois ? Mais déjà ont été constatés, comme dans toute crise, des pôles pour le futur se dessinant par rachat des entités les plus faibles, au premier rang desquelles figurent désormais Bank of America, une des affaires qui émerge favorablement de cette crise. Les différents rachats faits ce week-end exhibent en quelque sorte la fin du modèle des banques d'affaires ou d'investissement au profit des banques de détail. Avec la faillite de Lehman et l'absence de soutien dans le cas d'AIG ou le rachat de Merrill Lynch, le marché prend acte de la fin d'une partie du modèle de banque d'investissement. C'est donc déjà un peu une tentative de début de fin de crise qui se dessine paradoxalement ici, même si encore une fois, la sortie à terme n'est nullement garantie et recèle en elle très clairement un risque systémique jamais vu qu'il convient de garder à l'esprit.
Action concrète qui en découle ce jour : chaque établissement engagé avec Lehman a compté les pertes qu'il allait encourir et ce, aux quatres coins de la planète, créant un risque global mais aussi un ensemble de réactions pour se prémunir à l'avenir de ce type de difficultés. Cela enclenche un mouvement où les plus faibles apparaissent renforçant sur le globe toute restructuration nécessaire également.
Ce jour encore les principales spéculations ont concerné la baisse des taux de la Fed... - 0,25 % à - 1 % étaient attendus par certains compte tenu de la grande tension présente. Verdict : maintien des taux à 2 %. Le message se situe donc comme hier sur la nécessité de voir l'ensemble du secteur 'compter ses morts et faire les comptes' tout en lui allouant les capacités en terme de liquidités pour procéder à cet effet. La FEd, la BCE et la BoE ont ainsi procédé à des injections massives encore aujourd'hui dans cette optique.
Le pari de l'apurement est donc en marche avec un effet positif immédiat qui est caché par les effets d'annonce et les grands doutes qui subsistent pour la suite de la manoeuvre tellement le problème est profond.
Les marchés européens ont ainsi connu une nouvelle phase de baisse mais une partie de la cote a tenté le rebond. Les financières comme BNP ou AXA ne figurent plus en tête des baisses. Le CAC 40 perd encore - 1,96 % mais préserve le seuil des 4 000 points. Le DAX repris sur le graphe ci-dessous montre d'ailleurs très bien cette baisse mais avec des tests de supports pour l'heure concluants. L'essentiel est préservé sur la séance. Le marché fait le tri entre le bon grain et l'ivraie.
Ceci étant posé, la figure sur le DAX 30 reste cependant très menaçante et sera surveillée étroitement pour les prochains développements avec les zones clefs en orange et rouge. La difficulté de fond réside dorénavant dans les débouclages de positions et liquidations qui vont avoir lieu pour ces différentes institutions et qui en provoquant des pertes vont nécessiter des couvertures ou des compensations qui peuvent en amener d'autres et ainsi de suite... dans les moindres recoins de la planète.
A l'heure où le patron d'AIG, géant mondial de l'assurance, assure que son groupe est "solvable" mais nécessite un prêt relais pour des difficultés de trésorerie qu'il sollicite auprès du Trésor, il indique dans le même temps que le refus de ce prêt mènerait à un "désastre", le Dow Jones termine en hausse de + 1,30 % à 11 059,02 points. Toute la complexité de la situation se résume là dans cet énoncé à l'heure de la parution de cet article, les rumeurs évoluant de secondes en secondes.
Un vaste monopoly financier est entrain de s'orchestrer et nul ne sait où il mène.
Nous réitérons notre incitation à rester très concrets, sans a priori, sur les évolutions actuelles, à jalonner et à hiérarchiser les éléments à la fois pour éviter les emballements émotionnels et préserver vos avoirs, notamment par le biais d'ordres stop et le détermination de seuils de perte en-dessous desquels vous vous protégez, les graphiques étant un bon support pour ce type d'exercice concret.
Nous réinsistons sur l'intérêt d'avoir une approche globale pour cerner un tant soit peu le panorama général actuel qui en est à ce stade à des secousses sismiques et non plus de simples glissements de terrain. A cet égard on notera la chute du pétrole à 92,76 $ le baril et la fermeture de la bourse de Moscou sur une baisse de - 11,50 %. La bourse d'Oslo a également atteint une perte de - 10 % en séance avant de finir en baisse de - 5,78 %. L'indice sectoriel des places nordiques de l'OMX fait état d'une chute de - 7,24 % ce soir des valeurs énergétiques alors que les financières ne cèdent que - 3,01 %, moins que le secteur des Telecoms. Le géant mondial russe de l'energie, Gazprom, chute de - 17,19 % sur les différentes places financières.
Les 'refuges' trouvés l'an dernier dans les matières premières ne sont plus à l'ordre du jour aujourd'hui. Dans un contexte comme celui rencontré actuellement, il faut être extrêmement vigilant avec la notion de 'refuge', les places considérées comme tel pouvant à n'importe quel moment changer de statut. En disant cela, nous ne faisons aucune exception sur le support de ce refuge potentiel quel qu'il soit, où qu'il soit et quelle que soit sa taille ou son importance, ni sur la capacité de certains types d'investissement à le redevenir à différents stades de la crise en cas de poursuite prolongée.
Le constat du jour est ainsi à la traduction d'éléments sous-jacents plutôt positifs paradoxalement tout autant que notre invitation est ce soir d'approcher avec la plus grande méfiance la notion de 'refuge absolu' dans lequel on peut se croire préservé.
Un adage dit d'ailleurs qu'il n'y a pas "d'en dehors" en Finance.
Nous laissons de côté pour l'heure les données statistiques parues ces 2 jours sur lesquelles nous reviendrons éventuellement en cas d'accalmie ou de chiffre clef. A signaler toutefois, l'indice allemand Zew du moral des investisseurs qui est ressorti en hausse au-delà des attentes (cf 2nd graphe ci-dessus)