Les hantises du subprime et credit crunch de retour
Gros mouvements de marché aujourd'hui plus vus depuis 6 ans dans l'impact que les évènements auront eu sur pratiquement tous les types de marchés et les plus grandes institutions financières. Vous avez vus quelques dominos tombés, nous avons ces derniers jours entendu quelques hauts-parleurs nous alerter d'éléments en équilibre instable voire en péril, aujourd'hui, l'effet de cascade ou de vases communiquants entre marchés se vidant au profit d'autres aura été à son comble.
Déclencheur :
L'annonce par la BNP que 3 de ses fonds ou sicav seront suspendus pour cause d'impossibilité de calculer une valeur liquidative les concernant en raison d'investissements en leur sein liés aux subprime a ranimé la peur sur les marchés du crédit. C'est plus l'impossibilité d'assurer une cotation sur ce type d'investissement qui est en jeu que leur fondement et leur qualité, la banque précisant que les notations sont parmi les meilleures. Un marché asséché ou plus rien ne se cote est ainsi le lot actuel des subprime qui ne trouve plus d'acheteur en face de vendeurs, phénomène qui se répand comme on l'a vu ces derniers jours à l'ensemble du marché du crédit et particulièrement sur les LBO, les banques se retrouvant litérralement avec des dettes invendues sur les bras.
La nouvelle fait mauvais effet dans la mesure où la banque avait publié il y a quelques jours ses résultats et rassuré sur la crise du subprime. Il est vrai qu'il ne s'agit pas là d'un impact sur ses avoirs propres mais de fonds qu'elle gère pour compte de tiers (investisseurs, épargnants, etc...), l'un des effets de la titrisation, je le rappelle, étant d'externaliser les crédits des banques pour les coter sur les marchés, certains gérant de fonds s'en servant de support d'investissement pour investir les fonds de leurs souscripteurs motivés en cela par la recherche de rendements supérieurs en rapport avec le risque on le voit à nouveau..
- * Attention, suivant nos informations à l'heure qu'il est, il ne s'agit pas 'de fermer' les fonds ou de les 'liquider' (valeur liquidative étant d'ailleurs le terme utilisé pour parler de valeur ou de cotation d'un fonds de manière ordinaire) mais de 'suspension' dans l'attente de pouvoir refixer une valeur avec des prix de référence sur les investissements sujets à assèchement de transactions, la banque répondant en cela à des normes en vigueur notamment. Sans prix de référence pour les subprimes et support titrisés... pas de valeurs liquidatives à communiquer aux clients...
Conséquences : les bourses européennes ont chuté de façon importante emmenées par les financières dans un climat de rumeurs négatives sur la tenue d'une réunion par la Bundesbank sur la situation de WestLB avant d'être démenti car il s'agissait en fait du renflouement déjà maintes fois évoqués de la banque IKB. La perte d'un hedge fund de goldman sachs gérant 9 milliards de $ qui aurait des positions en difficulté a également, entre autres, fait partie des rumeurs qui ont émaillé la séance.
Les investisseurs ont ainsi quitté les actions, la BNP ayant des effets jusqu'à New York où les taux sur obligations d'Etat comme en Europe auront connu une forte baisse, les opérateurs réalisant un vol vers la qualité et venant y trouver refuge. Par contre, le marché monétaire fût pris d'assaut sous la difficulté à trouver du crédit et la raréfaction de leur liquidité en de nombreux compartiments des marchés obligataires. Cf. La courbe des taux US : le trampoline des marchés financiers
Le fait notable :
La BCE (Banque Centrale Européenne) a ainsi apporté en fonds d'urgence, pour la première fois depuis le lendemain du 11 septembre, près de 100 milliards d'Euro aux banques et au marché monétaire qui a réalisé un pic à 4,70 % en ce qui concerne le taux au jour le jour, contre 4 % pour les taux directeurs officiels, un mouvement de hausse de ce type touchant aussi les USA (passé de 5,22 % mercredi à 5,86 % !). L'opération fit ensuite redescendre les taux en direction des 4,10 %. Les opérateurs du marché monétaire ont ainsi observé une panique et un rush vers le 'CASH' dans un climat de défiance accrue concernant les crédits et de prudence vis à vis du secteur bancaire.
Inquiétante pour certains ou montrant la réactivité de la BCE et des autorités monétaires quoiqu'il en soit : Les investisseurs en mal de crédit ont donc dévalé la pente de la courbe des taux vers les échéances courtes pour trouver preneur à leurs demandes de crédit amenant l'institut d'émission de l'Euro à agir. La rivière s'asséchant, on court la bouche en avant langue pendante vers la source même... sur le chemin ...'Cash demandé, dettes répudiées'...
Situation graphique :
Le rejet graphique pour le CAC 40 a été très marqué sur la droite oblique baissière supérieure, les vendeurs reprenant un pouvoir indiscuté ramenant les cours jusqu'au point de refermer les 2 gaps ouverts à la hausse lors du retournement du début de semaine, les cours terminant sur le support au même niveau qu'avant hier soir à 5624,78 points en baisse de - 2,17 % dans des volumes magistraux (> à 10 milliards d'€) pour un 9 août et sous la moyenne mobile à 7 jours. Voir ---> CAC 40 - Analyse graphique court terme : une structure de retournement à confirmer
Autres aspects : L'ensemble des bourses européennes sont touchées ainsi que le Dow Jones qui reperd - 1 % alourdi par les financières, l'or et l'argent perdant - 1,51 % et - 2,86 % alors que le refuge dans les obligations d'Etat joue en faveur du $ en hausse contre euro mais en baisse conte yen, les opérateurs débouclant les opérations de carry trade consistant à emprunter du yen pour replacer en dollar, la différence de taux étant de près de 5 %. L'euro/franc suisse est ainsi en baisse comme l'euro/yen (-1,67 %) en raison du delta de rémunération favorable à l'euro qui amène une grande part des liquidités à être lever par ce biais...
...Empûnter à 0,5/1 % en yen pour le replacer à 4 % en Europe dans un climat de défiance et de pertes amènent les opérateurs à rembourser leurs crédits et leurs positions les plus spéculatives et donc... à acheter du yen contre euro pour rembourser et déboucler les positions prises, la hausse du yen ainsi provoquée amenant d'autres à devoir 'se racheter' pris sous la peur de devoir avoir à rembourser encore plus plus tard etc...
Moins de yen emprûnté à bas taux...moins de liquidités en Euro et en Europe.... moins de soutien aux actions et actifs à fort rendements... nouvel exemple et constation de l'aversion au risque actuel et des décalages qui en résultent.
Enfin, Bush en personne est monté au créneau pour mettre en garde la Chine qui vient de faire des menaces à peine voilées de ne plus acheter d'obligations US et risquant de faire plier le dollar... la Chine, entre autres, banquier des USA arborant la même attitude que tout investisseur en proie à la sauvegarde de ses avoirs et des dettes allouées sur ses deniers.
Conclusion : Sur les 4 plus grosses sources de liquidités ou de dettes actuelles mondiales à savoir :
- - immobilier et titrisation (les fameux 'subprime')
- - LBO et titrisation (voire les articles de ce week-end)
- - Carry trade de devises (entre devises à taux forts et faibles)
- - déficit commerciaux (le déficit US étant bien une dette magistrale)
la journée aura montré que les 4 sont impactés de façon différentes certes mais au minimum ont été mises 'dans la balance'.
Moins de dettes immobilières, moins de dettes pour le rachat de sociétés, moins de dettes levées du différentiel de taux entre devises, moins de dettes issus du déficit commercial, l'asssèchement du crédit ou 'credit crunch' n'est plus un cauchemar uniquement sectoriel mais une réalité de plus en plus diverse et générale ce soir à quelque niveau que ce soit.